Voici un article sur ma façon d’envisager la diversité génétique. Bien que je ne sois pas spécialiste en génétique, c’est un sujet qui me passionne depuis de nombreuses années. J’ai passé beaucoup de temps à discuter avec des scientifiques et à me renseigner sur le sujet. Des questions sont au cœur de mes recherches :
Comment les traits se transmettent d’une génération à l’autre? Comment certains facteurs influencent l’expression des gènes? À quoi sert la diversification génétique d’une lignée de chiens?
C'est cette curiosité qui m'a amenée à intégrer des outils dans mon programme d'élevage, notamment les tests génétiques pour dépister des maladies héréditaires et évaluer la diversité génétique.
Quand on élève des chiens, il est essentiel de bien connaître sa race, y compris son patrimoine génétique. En étudiant les pedigrees du Doberman et en approfondissant mes lectures sur la question, j'ai réalisé que la diversité génétique posait un réel problème. De nombreux chiens issus des mêmes mâles très populaires revenaient fréquemment dans les lignées, rendant difficile la recherche de lignées exemptes de ces ancêtres.
Plus je creusais, plus je ressentais de l'inquiétude, au point de me demander si me lancer dans l'élevage était judicieux. Certains estiment même que c'est une cause perdue d'avance.
La consanguinité [inbreeding]
Le inbreeding est le fait d’être apparenté à d’autres individus proches (cousins, frères, parents, grands-parents, etc.). Le inbreeding se qualifie selon divers degrés à travers les générations. L’opposé de la consanguinité est la diversité.
La diversité génétique et la diversité du pedigree
La diversité génétique est un concept qui évalue si les chiens partagent des gènes identiques ou possèdent des gènes variés et/ou rares. Ceci peut être vérifié par des tests génétiques et des calculs approfondis. | Note : Avoir des gènes rares n'est pas automatiquement bénéfique. Par exemple, l'albinisme est un gène rare, mais il peut causer des problèmes de santé, ce qui le rend indésirable. |
La diversité du pedigree correspond à l'analyse des ancêtres d'un chien afin d'évaluer la variabilité génétique. Elle est souvent utilisée pour réduire le risque de consanguinité. L'apparition répétée d'un même chien sur plusieurs générations peut indiquer un pedigree peu diversifié. Lorsqu'un éleveur vise à n'avoir aucun ancêtre commun entre le mâle et la femelle sur plusieurs générations, on parle alors d'un outcross basé sur le pedigree. | Note : Un pedigree avec peu d'ancêtres communs sur 5 ou 7 générations ne garantit pas forcément une diversité génétique réelle. Certains gènes dominants peuvent se transmettre sur plusieurs générations, même lorsque les ancêtres semblent éloignés! |
Quelques outils
Actuellement, les outils pour mesurer la diversité génétique ne sont pas encore totalement aboutis. Embark et UC Davis proposent des tests basés principalement sur des marqueurs SNP (Single Nucleotide Polymorphism) qui analysent des points spécifiques du génome [ensemble des gènes] canin. Cependant, leurs approches diffèrent :
Embark : Analyse un grand nombre de marqueurs SNP, couvrant plusieurs segments du génome, et fournit des informations détaillées sur la diversité, les risques de maladies génétiques, les traits physiques et la parenté. Sa base de données est plus vaste, ce qui peut améliorer la précision dans certaines races populaires.
UC Davis : Se concentre sur un nombre plus restreint de marqueurs SNP et se spécialise davantage dans l'évaluation de la consanguinité [proximité familiale entre des chiens] et la diversité génétique globale. Il est souvent utilisé pour mesurer l'hétérozygotie, c'est-à-dire la présence de deux versions différentes d'un même gène chez un individu, ainsi que la variabilité génétique au sein des lignées.
Les résultats de ces tests sont calculés en comparaison avec la base de données spécifique à la race testée qu'ils possèdent. Si cette base contient principalement des chiens d'une même lignée, il peut être facile d'obtenir l'apparence d'une grande diversité en comparaison. Inversement, si elle inclut des chiens porteurs de gènes non souhaités, ces individus pourraient apparaître comme très diversifiés, bien que cela ne soit pas forcément souhaitable.
On pourrait croire qu'améliorer la diversité génétique est simple, mais ce n'est pas le cas. Accoupler deux chiens non apparentés est techniquement facile, mais cela ne garantit pas la préservation des traits et tempéraments souhaités. De plus, cela peut introduire de nouvelles maladies héréditaires ou des problèmes de santé imprévus.
C'est un processus qui se déroule sur plusieurs générations, parfois plus, car lorsqu'un trait souhaité est perdu en chemin, il peut falloir du temps pour le récupérer. Les éleveurs consciencieux ont chacun leur propre vision des objectifs à atteindre, et c'est tant mieux ! Si tout le monde suivait la même approche au même moment, on risquerait de retomber dans le même problème de diversité réduite.
Je vous montre des exemples: [Pour lire les graphiques, il faut regarder le positionnement de la flèche rouge par rapport aux couleurs de fond. Plus la flèche se rapproche du vert, plus le chien aura de la diversité génétique, et sera moins “inbred”/consanguinité] Deux sœurs issues de la même portée, donc des mêmes parents [aucun ancêtres communs avant la 5-6e génération], mais avec une diversité génétique différente :
Même mère que la section précédente, mais pères différents, sans aucuns ancêtres communs avant la 7e génération (donc entre 0,1 et 0,07 plus diversifié avec un père différent):
Un pedigree « outcross » [sans aucun ancêtres communs], comparaison entre deux sœurs [d’une même portée]:
Conclusion
Comme vous pouvez le constater, même des chiens qui n’ont pas d'ancêtres communs au pedigree ne font pas nécessairement augmenter de manière significative le niveau de diversité génétique [ne ramènent pas drastiquement la flèche vers le vert].
Il faut donc, en tant qu’éleveur, avoir le souci de la diversité génétique et de la diversité par pedigree. La première peut nous apporter de l’évitement de certaines maladies, la deuxième nous permet de travailler strictement pour évacuer la consanguinité par pedigree. Les deux approches coexistent dans mon programme d’élevage, et je vais toujours faire tout en mon possible et mes connaissances pour faire des choix éclairés, avec comme objectifs la longévité dans la santé, avec des bons tempéraments.